De l’intime
Cette partie réunit quatre articles qui témoignent de la diversité des approches de l’écrivaine : le cinéma, l’intertexte conjugal, l’étude de la correspondance avec sa sœur Lili Brik, la place du vestiaire dans son œuvre.
Nicolas Thierry propose dans « Elsa la rose d’Agnès Varda : du soliloque du poète à la réponse des créatrices » une analyse du court-métrage d’Agnès Varda, Elsa la rose. Il montre comment la réalisatrice réussit, en résonance avec son propre vécu, à démythifier « Elsa la rose » sans pour autant sacrifier Aragon et comment Varda rend son humanité à l’écrivaine. Nicolas Thierry offre aussi la retranscription du script d’Elsa la rose, utile pour les recherches à venir.
Maryse Vassevière, dans « Elsa Triolet, en écrivant, en lisant » s’intéresse à un aspect peu abordé : les difficultés rencontrées par la traductrice d’Aragon, Gide et Céline soumise aux réviseurs soviétiques et à leur conception bien arrêtée de ce qu’il convient d’écrire dans l’URSS de Staline. Maryse Vassevière montre combien ces traductions et les difficultés afférentes ont importé dans l’itinéraire de cette écrivaine, comment elles éclairent l’entrelacement de deux œuvres, Les Beaux Quartiers d’Aragon et Bonsoir, Thérèse de Triolet et comment elles ont parfois causé une extrême tension dans la relation du couple.
Carolle Gagnon, ancienne conservatrice du Musée du Séminaire de Québec au Canada et spécialisée dans l’architecture et la sémiotique, traite dans « La Correspondance de Lili Brik et Elsa Triolet comme séjour » de la relation des deux sœurs à travers leur important échange de lettres jusqu’ici peu étudié, et montre, grâce à des concepts opératoires empruntés au vocabulaire de l’architecture, particulièrement bienvenus pour une écrivaine qui a une formation d’architecte, que cette correspondance, riche de petits bonheurs et lourde de silences, tient lieu de « séjour », vital pour Triolet.
Marie-Vincente Calendini se penche dans « Le vestiaire d’Elsa Triolet » sur l’expérience pratique des milieux de la mode, pour lesquels la romancière a elle-même travaillé en créant des colliers pour la haute couture et explique comment cette expérience travaille son écriture : les vêtements, les chaussures et la parure de manière générale tiennent lieu de « motifs récurrents voire obsessionnels dans sa poétique, constituant un fonds d’images pour dire le monde, les paysages, les émotions et l’acte scriptural lui-même, au sein de nombreuses métaphores couturières ».