Dits d'Aragon (3)
Recueillir ici et là quelques citations ou maximes parlantes de l'œuvre - si vaste et si diverse - d'Aragon, peut paraître entreprise dérisoire, et même dangereuse. Le risque serait de survoler et de clicher chaque ouvrage en quelques phrases. Ce risque est présent certes, mais il est aussi intéressant - par un choix qui sera personnel - de laisser un chemin parsemé de cailloux aux lecteurs, sur le siècle, ce siècle d'Aragon qui aura vu tant d'horreurs et d'espoirs, ses espoirs déçus n'ayant pas annihilé une générosité, un dévouement total pour la défense de la culture et un courage dans l'action.
Aragon aura été admiré par les uns, mais le plus souvent il fût l'un des auteurs français qui aura, plus de 30 ans après sa mort, suscité le plus d'acharnement et de haines littéraires et politiques.
Cet ensemble de citations aura pour seule ambition de faire lire ou relire l'œuvre d'Aragon et tentera de montrer les constantes qui existent depuis les premiers poèmes de Feu de joie jusqu'aux photographies légendées de la fin de sa vie.
Il sera procédé chronologiquement afin de suivre son cheminement poétique ou romanesque.
On se rapportera pour chacun des ouvrages ci-dessous à la bibliographie intégrée au site des amis d'Aragon et à l'édition des œuvres poétiques et romanesques dans la bibliothèque de La Pléiade.
Le R�alisme socialiste, la militance
(1933-1940)
La rupture avec le groupe surr�aliste co�ncide pour Aragon avec la d�couverte d'un nouveau monde: celui du monde du travail, du mouvement communiste international, de l'adh�sion militante au PCF. Aragon, par des voyages successifs et prolong�s qu'il effectue en URSS � partir de 1930, touchera de pr�s une soci�t� en pleine transformation et r�volution. Enfin, Aragon devient journaliste � l'Humanit� et dispose ainsi d'un salaire modeste mais r�gulier. Aragon apprendra vite ce m�tier de journaliste honni par les surr�alistes et deviendra en 1937 le directeur d'un grand journal du soir, "Ce soir" (voir les articles parus en volume dans les Annales n� 19 et 20). D'un point de vue �ditorial, ces ann�es ne verront para�tre que quatre �uvres parmi lesquelles les deux premiers romans du cycle le "Monde r�el". Cette p�riode voit l'arriv�e au pouvoir du nazisme en Allemagne, la mont�e du fascisme en France et aboutit � la seconde guerre mondiale. Aragon sera �galement fort actif dans les diverses manifestations pour la d�fense de la Culture et pour la d�fense de la R�publique espagnole.
1934. Hourra l'Oural
Aragon et Elsa Triolet vivent en Urss de juin 1932 � mars 1933, c'est pour Aragon l'�loignement d'avec la vie litt�raire parisienne et du groupe surr�aliste. Ils participent avec d'autres �crivains �trangers � la vie quotidienne dans l'URSS du plan quinquennal. Aragon dans ses commentaires de l' OP I sera tr�s dur pour "ce po�me" d'Hourra l'Oural" ainsi que pour son po�me Front Rouge. Litt�rairement, ce po�me se rapproche du futurisme de Ma�akovski et d�crit avec passion une sorte de "Far West sovi�tique" comme le souligne l'auteur lui-m�me. Aragon �crit ce po�me � son retour d'apr�s ses notes. Hourra l'Oural para�t chez Deno�l en avril 1934 (voir bibliographie de ce site).
"Maîtrise la technique Allume
le soleil de la qualité
Donne
Donne donne donne donne
donne donne donne donc
Pour la Ré-vo-lu-ti-on
Donne"
(Hourra l'Oural. in L'Oural parle; La Pléiade O.P. I p 553)
Plus simple ou simpliste on ne peut mieux faire, pourtant on remarquera le rythme et la découpe du vers qui fait penser au bruit du marteau sur l'enclume!
"la sueur formidable au dos puissant des travailleurs"
(idem. in Valse du Tcheliabtraktrostroï p 555)
"Vos marteaux désormais Forgerons
sont fiancés aux faucilles d'Octobre"
(idem in Zlatooust p 563)
"la clameur des mines où meurt
"l'amer remord d'hier
et le sang sur le sein des meneurs
"caillé comme un émail"
(idem. in 30 avril 1918 p 566)
Belle image qui évoque les temps passés sous le tsarisme.
''Retournez aux salles de jeux
Ô personnages nuageux
dont le retour est monotone
Ici l'auteur vous abandonne"
(idem in Je donne congé aux patrons p 570)
On remarquera qu'Aragon fréquentait les tables de jeux il n'y a pas si longtemps avec Nancy Cunard)
"Ils ont rendu l'homme à la terre
"ils ont dit Vous mangerez tous
Et vous mangerez tous
Ils ont jeté le ciel à terre
Ils ont dit Les dieux périront
Et les dieux périront...
Gloire sur la terre et les terres
au soleil des jours bolcheviks
Et gloire aux Bolcheviks"
(idem in Hymne p 573 et 574)
Aragon s'invente une nouvelle liturgie avant celle qu'il érigera à Elsa.
"Les mots de métal volent
le long de la route au vent malicieux des poteaux télégraphiques
Le petit cheval n'y comprend rien...
Le paysage est à genoux dans le socialisme
et l'électricité
étire ses doigts fins du ciel à la poussière"
(idem in 1932. p 175)
Le petit cheval symbole du passé est condamné par la modernité et le socialisme...
"Magnitogorsk
La nuit est belle
Magnitogorsk
Est-ce toi
Magnitogorsk
Et si c'est elle
Magnitogorsk
Est-ce moi
Magnitogorsk Oui c'est bien elle Magnitogorsk Et c'est moi"
(idem in Les Amants de Magnitogorsk p 578 et 580)
"Aux orties
d'ailleurs ta casquette mets ce casque
et prend ce fusil
Histoire de t'apprendre à vivre
quatre ans de Marseillaise avec
les pieds dans la merde et la gueule en sang
Marseillaise de Charleroi...
Cède le pas ô Marseillaise
à l'Internationale car voici
l'automne de tes jours voici
l'Octobre où sombrent tes derniers accents."
(idem in Réponse aux Jacobins p 593 et 594.)
Aragon reprend des accents antimilitaristes pour ce morceau de bravoure, un des meilleurs moments du poème.
1934. Les Cloches de Bâle
Hourra l'Oural ouvrait un chemin réaliste socialiste ou plutôt un sentier qu'Aragon ne poursuivra pas dans le domaine poétique. Au contraire, Les Cloches de Bâle qui paraît chez Denoël en décembre 1934 est le premier volume d'un cycle romanesque qui se réclame du réalisme socialiste et qui se poursuivra jusqu'au début des années 1950. (voir mes notes de lecture relatives à ce roman)
Ce roman est divisé en trois parties: Diane, Catherine, Victor; et un épilogue - porte-fenêtre vers l'avenir: Clara, évocation du personnage de la révolutionnaire Clara Zetkin. Aragon va montrer sa grande connaissance du monde frelaté de la bourgeoisie, des milieux d'affaires, des guerres de police et de la politique de la IIIème république à la veille de 1914 mis en miroir avec la situation politique de l'année 1934.
Aragon dans Les Cloches de Bâle évoque longuement la grève des taxis de 1912 alors que, journaliste à l'Humanité, il avait suivi une autre grève des taxis en cette année 1934, sans parler de l'insurrection d'extrême-droite de févier contre le parlementarisme. Les Cloches de Bâle est un roman de militant et de journaliste qui vérifie ses sources.
"Cela ne fit rire personne quand Guy appela M. Romanet papa."
(Diane ch I p 715. La PLéiade I)
Incipit humoristique d'Aragon quand on considère sa situation d'enfant adultérin.
"Guy continuait son chemin tout à fait ingénument, quand il sentit que le gamin venait derrière lui. Il pressa le pas instinctivement, pas assez cependant pour éviter un grand coup de pied dans le derrière: Je t'en foutrai, moi, des mômes comme ça! ...Guy était habillé en Van Dyck. C'était son premier coup de pied dans le cul; il venait de faire connaissance avec le prolétariat."
(In Diane ch.V p 741 idem);
Souvenir autobiographique d'Aragon?
"Mais rentier, ça vous paraît naturel à vous qu'il y ait des rentiers?"
(In Diane ch. IX p 768 idem)
"En quoi est-il mieux d'être la bête qui a des parasites, que le parasite sur le dos du bétail? Pour moi, je pense tout au contraire que c'est là ce qui s'appelle la civilisation."
(in Diane ch. IX p 769 idem)
"Mort au champ d'honneur, c'est plus reluisant que le suicide! Il en reste une belle et bonne colonie, des mines, des cultures, des villes, des ports, des routes, des voies ferrées."
(in Diane ch.XI, p 779 idem)
"En 1912, Catherine a vingt-six ans, et elle est un témoignage vivant de ce que le Dictionnaire Larousse affirme des Géorgiens, à savoir que c'est la plus belle race humaine qui soit au monde."
(in Catherine ch. I, p 782 idem)
Flatterie d'Aragon à propos de Staline?
"dans la société actuelle toutes les femmes sont des esclaves, et il faut prendre leur parti à toutes les occasions."
(in Catherine ch. I , p783 idem)
" Elle aurait voulu se comporter avec les hommes comme il est entendu qu'un homme se comporte avec les femmes. Un homme n'est pas défini par les femmes avec lesquelles il a couché. La situation des femmes dans la société, voilà ce qui révoltait surtout Catherine."
(in Catherine ch VII p810 idem)
"La liberté est une fin. Voilà pourquoi je suis anarchiste. Et non pas libertaire."
(in Catherine ch XVII p853 idem)
Dans la bouche de l'anarchiste Libertad, personnage du roman.
"Le monde comme une cage qui est autour de chaque homme."
(in Catherine ch. XX p 868 idem)
"Je suis partie intégrante de cet univers qui meurt."
(in Catherine ch XX p 870 idem)
Personnage d'Henry Bataille.
"Le cimetière du Père-Lachaise est une étrange ville où des palais en réduction rappellent, mêlés à des tombes misérables, les splendeurs bourgeoises des morts."
(in Victor ch VIII p918 idem)
"Le monde est une machine sanglante à laquelle les êtres se déchirent comme des doigts arrachés."
(in Victor ch XIX p 974 idem)
"Ce n'est pas pour rien que les propriétaires apprennent à leurs chiens à mordre tous les hommes en casquette."
(in Victor ch XX p979 idem);
"Le monde, lecteur, est mal construit à mon gré, comme à ton gré mon livre."
(in Clara II, p 992 idem)
"La femme des temps modernes est née, et c'est elle que je chante,
Et c'est elle que je chanterai".
(in Clara ch V p 1001 idem)
1935. Pour un réalisme socialiste
Pour un réalisme socialiste est un ouvrage constitué d'une série de cinq conférences données par Aragon en 1935 et complété en annexe par trois discours de Bezymenski, Bruno Jasiensky et d'Avdéenko. Aragon, dans ces discours ou conférences, y exprime son adhésion au "communisme triomphant et en train de se construire" en URSS. On peut observer chez lui que cette foi nouvelle se base sur un socle commun avec les surréalistes avec qui il a rompu, Aragon y fait référence à de nombreuses reprises à la poésie de Rimbaud, Lautréamont et Victor Hugo. Ce réalisme contient toute l'eau de la mer de ces trois auteurs ce qui présage déjà la formule de Garaudy Pour un réalisme sans rivage.
a) D'Alfred de Vigny à Avdéenko
Conférence prononcée le 4 avril 1935, à la Maison de la Culture, à Paris, et le 21 avril 1935 à la Maison des Tramwayman, à Bruxelles (voir ici)
"..nous sommes au moment où une classe nouvelle, le prolétariat, vient d'entreprendre cette tâche historique d'une grandeur sans précédent: la rééducation de l'homme par l'homme, pour la transformation du singe social de notre temps en l'homme socialiste de l'avenir."
(in Pour un réalisme socialiste, Denoël et Steele, 1935, p8)
"Staline a appelé les écrivains les ingénieurs des âmes, et cette expression qui a fait déjà fait couler passablement d'encre mérite qu'on s'y arrête."
(idem p11)
"Je pourrais reprendre toute ma vie d'alors, et ma littérature, et ce serait un roman comme il n'en existe pas, que je n'écris pas, bien plus parce que le temps me fait défaut, que parce que j'en ai honte. Au fait, je n'en ai pas la moindre honte: comme de toutes les contradictions qu'on peut trouver dans ce que j'ai été et dans ce que je suis. Je suis même, si vous voulez savoir, très fier de moi-même, voyant d'où je viens."
(idem p 19) Un exemple de la dialectique chez Aragon.
"Les temps ont changé, et il y a maintenant sur la terre une Commune triomphante"
(idem p 24)
b) John Heartfield et la beauté révolutionnaire
Conférence prononcée le 2 mai 1935 à la Maison de la Culture.
" Années brûlantes où, la Révolution abattue ici, là triomphante, surgissent de la même façon à l'extrême pointe de l'art, en Russie Maïakovsky, en Allemagne Heartfield. Et ces deux exemples, sous la dictature du Prolétariat, sous la dictature du Capital, partis du plus incompréhensibles de la poésie, de la forme dernière de l'art-pour-quelques-uns, aboutissent à la plus éclatante illustration contemporaine de ce que peut être l'art pour les masses, cette chose magnifique et incompréhensiblement décriée."
(idem pp43 et 44)
c) Message au congrès des John Reed Clubs
New-York, fin avril 1935.
"Longtemps cette révolte garda pour moi la forme de l'anarchie, et longtemps l'ancien dadaïste ne sut qu'applaudir à des gestes, à des mots, sans comprendre où étaient ses vrais alliés, ceux qu'il devait rejoindre. Waldo Frank se souvient sans doute d'une soirée folle où je l'entraînai chez les anarchistes, moi qui pensais alors que le geste de Germaine Berton tuant Marius Plateau était ce qui pouvait s'imaginer de plus beau, de plus grand. C'est qu'alors j'ignorais le prolétariat, sa tâche de tous les jours."
(idem pp50 et 51)
"Je suis revenu de l'U.R.S.S. et je n'étais plus le même homme."
(idem p 53)
d) Hugo réaliste
Discours prononcé le 5 juin 1935 à la Société allemande des Gens de lettres.
"Il y a plusieurs manières de prendre Hugo. La manière, aujourd'hui, pour des gens qui sont jeunes, c'est de le prendre par la barbe."
(idem p 61)
e) Le retour à la réalité
Discours prononcé le 25 juin 1935, au Congrès international des Ecrivains pour la Défense de la Culture.
"Réaliste, Hugo qui réclame le droit de cité de l'argot dans la langue, et le droit de vivre en France pour les communards."
(idem p 75)
"La leçon de modernisme de Rimbaud est une leçon de réalisme au delà même de son génie, de sa vie, de ses poèmes."
(idem p 77)
1936. Les Beaux Quartiers
L'année 1936 est une date importante pour Aragon et la gauche française avec l'arrivée au pouvoir du Front Populaire. Il fait paraître chez Denoël son deuxième roman du cycle Le monde réel Les Beaux Quartiers qui reçoit le prix Renaudot. Ce roman marque un approfondissement chez Aragon des thèmes du réalisme socialiste, il intègre par exemple dans son livre Les collages provenant de son travail de journaliste à l'Humanité ce qui donne à cette œuvre l'aspect d'un reportage vivant et vécu. Livre de militant mais aussi remarquable analyse d'une époque avec toute la virtuosité d'Aragon au sommet de son art. Pour retrouver in extenso plusieurs grandes descriptions et morceaux de bravoure de ce roman on se réfèrera aux notes de lecture du site.
"Tout de même, si on doit absolument se séparer de serviteurs, il va de soi qu'on garde ceux qui sont contents de leur place, et non pas ceux qui sont toujours à récriminer. Ceux-là peut-être qu'ailleurs ils seront plus heureux, et que la grâce les touchera."
(in Sérianne ch IV, p 62 La Pléiade II); (Humour grinçant d'Aragon qui exprime très bien la pensée patronale)
"Un seul moyen: baisser les salaires des ouvriers. Remarquez que c'était leur intérêt, naturellement pas immédiat...On ne peut pas toujours avoir un point de vue immédiat. Il faut bien penser à l'avenir. Donc les ouvriers devaient comprendre que leur véritable intérêt était la prospérité de leur usine."
(idem ch IV, p 64)
"C'est contagieux, les grèves."
(idem ch IV , p 64)
"La vie économique du pays, voilà où est la réalité"
(idem ch IV p 66)(Aragon exprime ci-dessus la pensée économique et sociale du patronat)
"Il n'y a ainsi chez l'homme quelque chose de plus profondément à lui que son visage, de petites habitudes, des manies. C'est de l'horreur de ces manies qu'est faite une vie conjugale, c'est de l'attendrissement sur ces manies que sont faites les amours durables"
(idem ch V p 66); (Citation ambiguë d'Aragon sur le couple)
"De si loin qu'Armand se souvienne, il y a dans la maison de grands silences, puis des portes qui claquent, des pas précipités, et maman qui sanglote la tête dans les coussins, tandis que filtre, par les jalousies, une douce lumière d'or qui vient mourir aux pieds d'ivoire du crucifix."
(idem ch IX p 84); (Sans doute une évocation autobiographique d'Aragon)
"...il arriva cette chose étrange que Thomas d'Aquin le poussa dans la voie du culte de la personnalité. Être saint? pensait-il, tout naturellement, c'est devenir soi. Un camarade de collège, là-dessus, lui prêta Le Jardin de Bérénice et la mystique d'Armand devint follement barrésienne. Barrès justifiait en lui la montée d'une sensualité qui ne se connaissait guère, et catholique par son départ, sa pensée courait à l'apostasie."
(idem ch XI p 99); (On rappelle (voir notes de lecture) qu'Aragon ne reniera jamais son goût pour l'œuvre de Barrès)
"L'Amour, dont les Livres Saints mêmes ont dû emprunter le nom pour entraîner les cœurs"
(idem ch XII p 106)
"Il [Armand] s'était vu une fois pour toutes, grand, dans une soutane, dans un pays surtout qui ne serait pas Sérianne, vivant comme vivent les prêtres, c'est -à-dire à ne rien faire. S'il n'entrait pas en religion, il faudrait choisir un métier, travailler."
(idem ch XIII p 107); (Humour antireligieux de l'ancien surréaliste!)
"On est d'un côté ou de l'autre et voilà tout. Les ouvriers restent les ouvriers et les maîtres sont les maîtres. Pour eux, il n'y a qu'une alternative, celle qu'a posée Georges Sand: Le combat ou la mort, la lutte sanguinaire ou le néant !..."
(idem ch XXI p 148); (Aragon met en relief la personne de Georges Sand, écrivaine féministe et progressiste du XIXème siècle)
"Le soleil pesait sur la tête d'Armand comme un genou."
(idem ch XXIV p 161)
"Il faisait bleu comme jamais dans la vie d'un homme. Tout était blanc qui n'avait pas la couleur du corbeau."
(idem ch XXVI p 189)
"Les gens, quand ça meurt, c'est comme des figues..."
(idem ch XXVII p 201)
"Il y a dans chaque homme une incertitude de l'heure suivante, de la folie suivante"
(in Paris ch I p 208 La Pléiade II)
"Rêves, rêves de la pierre: les statues aux yeux blancs rêvent sur les places."
(idem ch I p 209); (Cette fin de chapitre est un véritable poème en prose...ce Paris aux statues comme un tableau de Chirico)
"On ne retient pas sa jeunesse"
(idem ch VIII p 243)
"Paris...une grande ville avec beaucoup de bancs et de belles maisons...pas les neuves...on ne sait plus bâtir aujourd'hui..."
(idem ch XIII p 261); (Une des nombreuses assertions sur Paris)
"Avec l'engouement présent pour la patrie, il faudrait se surveiller du côté des sentiments patriotiques."
(idem ch XV P 273); (phrase qui reflète bien qu'Aragon dans son œuvre et dans ses écrits a toujours oscillé entre le rejet du patriotisme tout en faisant son devoir de citoyen et revendiquant un attachement à l'idée de de Patrie)
"Nous sommes, comme les autres, des êtres doubles. Nous vivons à une époque historique qui se caractérisera peut-être un jour par là: le temps des hommes-doubles. J'ai fait toujours deux part de ma vie..."
(idem ch XVI P 275-276); (Le thème de l'homme-double sera repris en 1965 dans La mise à mort)
"L'amour ne tient pas, vois-tu, contre les affaires."
(idem ch XIX p 291);
"...au dessus de la ville, blanche, écœurante comme un fromage, l'énorme provocation du Sacré-Cœur de Montmartre."
(idem ch XXIX p 335); (Le Sacré-Cœur est le symbole de la droite versaillaise et anti communarde)
"Ecoute, crapaud...il n'y a qu'une seule chose au monde qui compte, c'est l'amour."
(idem ch XXXII p 359); (d'Edmond, un double d'Aragon, à son frère Armand)
"Les femmes parlent des choses du lit, ça n'a que rarement ce ton de blague des hommes. Mais, pour la précision, elles leur rendraient des points. Pour la trahison aussi."
(idem ch XXXIII p 362)
"Le mardi, errant par les rues, regardant avec fringale la nourriture des magasins, il avait pu jouer à l'ouvreur des voitures."
(idem ch XXXVIII p 376); (détail autobiographique corroboré par Philippe Soupault: Aragon, devant les palaces, a ouvert les portes des voitures pour manger !)
"Il y eut aussi, chez Edmond, la découverte du hasard. La disqualification de l'argent, de cet argent haï et aimé, dont il sentait le besoin et la dépendance."
(In Passage Club ch I p 386 Pléiade II); (autre détail autobiographique, Aragon a découvert les salles de jeu avec Nancy Cunard)
"Oh, la jeunesse est un alcool et un baume à ces plaies mal fermées qu'on porte en soi partout, dans les ténèbres de la chair!"
(idem ch III p 395)
"Vous êtes tous prêts à trahir. Toujours. La première fois qu'on s'en aperçoit, on crie, on pleure. Et puis ça se tasse. Je crois à la fidélité des femmes. A celle des hommes pas une minute."
(idem ch VII p 415); (thème sensible de la trahison)
"L'existence est un beau gâchis."
(idem ch XIII p 437)
"On sait que les Français aiment leur armée. On sait moins comment ils l'aiment."
(idem ch XXI p 464)
"Camarades, dit-il, camarades...Vous voyez bien qu'il ne faut jamais désespérer!"
(idem ch XXIII p 477); (Excipit du roman, cette phrase reflète la prise de conscience et l''adhésion d'Armand Barbentane et de son double Aragon à la cause révolutionnaire et prolétarienne).
Fin de la troisième partie des Dits d'Aragon
Aller à la quatrième partie des Dits d'Aragon